Notre avion se pose à Armenia, chef-lieu de la province du Quindio, plus petite province du pays et qui porte le nom du petit fleuve qui la traverse. Ce qui nous frappe en sortant de l’appareil c’est la température. Il fait environ 25° C parce que notre altitude n’est plus que de 1200m et c’est bien agréable.
Andrès, le chauffeur qui doit nous conduire à notre hébergement est tous sourires et ne récrimine pas contre Avianca et son heure de retard. Cela semble être dans la nature des choses à tel point que la compagnie affiche systématiquement des durées de vol supérieures de 30mn à la durée réellement nécessaire de manière à ce que les retards ne se voient pas trop et à ce que les correspondances puissent être effectuées sans trop de difficulté.
La Colombie est en effet un grand pays par sa surface qui est environ le double de celle de la France. Dans la mesure où le réseau routier, bien qu’en perpétuelle amélioration, n’est vraiment pas à la hauteur à ce jour et qu’il n’existe pratiquement pas de réseau ferré, la plupart des déplacements un peu longs (plus de 250 km soit 6H de route) se font en avion et même des villes moyennes comme Arménia sont desservies.
Le réseau aérien domestique est en étoile c’est à dire que la grande majorité des lignes partent ou arrivent à Bogotá et il y a peu de déssertes transversales si ce n’est entre des grandes villes comme Medellin, Cali ou Barranquilla. Il est donc très important que les correspondances à l’aéroport de Bogotá (qui porte le doux nom d’El Dorado) se fassent sans trop de difficulté. D’ailleurs nous testerons cela des demain puisque nous devons aller de Pereira à Neiva en passant bien sûr par El Dorado.
Quindio, Colombia
La seconde chose qui nous frappe en arrivant à Arménia, c’est la végétation. Elle est ici abondante et tout est très vert autour de nous avec des essences très diverses : palmiers, bananiers, avocatiers, bambous et beaucoup d’autres que nous ne connaissons pas.
Enfin, nous avons une impression générale d’ordre et de propreté. Bien sûr ce n’est pas la Suisse, il s’en faut de beaucoup, mais c’est beaucoup plus net que ce que nous avons pu voir jusqu’à présent du pays.
Andrès nous conduit en 40 mn à la Finca Puerto Alegre qui va être notre « home sweet home » pendant 48H. Une finca est une exploitation agricole de taille moyenne la taille supérieure étant appelée Hacienda. Dans la région d’Arménia, de nombreuses fincas ont été aménagées pour qu’à côté des activités agricoles puissent être accueillis des touristes.
C’est le cas de la finca Puerto Alegre qui poursuit sa vocation agricole sur une trentaine d’hectares mais qui dispose d’une dizaine de chambres pour accueillir des touristes, les propriétaires n’habitant pas sur place.
Nous sommes les seuls hôtes lors de notre séjour et c’est un peu dommage car comme nous n’avons pas un programme trop chargé, nous aurions bien voulu échanger avec d’autres voyageurs. Toutefois, les propriétaires ne parlant pas un mot d’anglais ont engagé pour 48H un jeune étudiant, David, parlant très bien la langue de Shakespeare, pour servir « d’interface » et nous aider pendant notre séjour.
En fait David, qui a 23 ans et qui prépare un doctorat de philo, est un jeune extrêmement intelligent et ouvert. Il adore discuter et pendant des heures nous allons sinon refaire le monde du moins échanger sur le sens de la vie et nos expériences respectives. Bien sûr, privilège de l’âge, j’en ai plus que lui et cela le frustre que je calme ses ardeurs.
Bourré de contradictions et se cherchant visiblement, il est gauchiste et croyant, envisage d’entrer dans les ordres mais avait une petite amie « canon », est séduit par les thèses anarchistes mais se réfère sans arrêt au bouddhisme, n’aime pas les touristes mais nous aime bien, rage sans arrêt contre les pays du premier monde (les riches) et leur néo-colonialisme, est curieux de tout, vénère Che Guevara mais aimerait décrocher une bourse pour aller étudier en Allemagne. En un mot il me rappelle furieusement un type que j’ai bien connu il y a une quarantaine d’années : moi-même.
Et que ça fait du bien de discuter avec ce qu’on a été !
Mais il n’y a pas que David à la finca et nous avons quelques visites à faire.
Nous commençons par aller faire un tour au village de Pijao. C’est très rafraichissant, au sens propre parce que nous sommes montés un peu et avons perdu 3 ou 4°C, et au sens figuré parce que c’est un village paisible, plutôt joli et sans l’ombre d’un touriste à part nous. Nous déambulons dans les rues et sentons sur nous des regards curieux mais bienveillants. Les habitants les moins timides nous saluent d’un « buenos dias » auquel je réponds par la même formule en ajoutant, par civilité, un señor ou señora.
D’un bar sur la place principale s’échappe une musique délicieuse, pas une cumbia ni une salsa mais une musique populaire avec guitares, charangos et accordéons avec un petit côté blues latin. J’adore.
Nous continuons notre programme en aller visiter une exploitation de café, la cafètera San Alberto. Diégo est notre guide. Il commence par nous entraîner sur les pentes pour nous montrer les alignements de plants de café puis dans les ateliers pour nous détailler les différentes étapes du processus qui mènera à la commercialisation de grains de la plus haute qualité. Sans entrer dans les détails que vous pourrez trouver sur le site de la société, je suis très impressionné par la haute conscience écologique et la préoccupation constante de qualité qui prévalent à toutes les étapes du processus de fabrication.
Une fois cette visite terminée, nous avons droit à une petite séance un peu plus « fun » puisque nous allons tester nos capacités olfactives et gustatives respectives dans un laboratoire dédié.
On commence par nous faire goûter en aveugle des verres où l’eau a été mélangée avec des solutions sucrée, salée, amère et acide. Là c’est plutôt facile et je m’en sors bien.
Puis on passe aux odeurs et il nous faut identifier celles dégagées par différents flacons parfumés avec des senteurs fruitées, herbales, terreuses, animales, épicées … Là, c’est la cata ! Je suis vraiment nul. Mais ce n’est pas grave parce que de toute façon on nous remet une sorte de diplôme ou plutôt de certificat que nous conserverons précieusement en vue de son encadrement et de sa fixation sur un mur bien en évidence dans notre maison 🙂
Voici celui de Gaby :
Je ne résiste pas au plaisir de vous donner une traduction approximative de ce document :
« Le Maître Dégustateur des cafés San Alberto certfie que Gabriela Choisne a participé avec succès à un baptème cafetier au cours duquel elle est parvenue à éveiller ses sens et, grâce aux connaissances acquises, est devenue une ambassadrice des cafés San Alberto. Dorénavant elle ne dégustera que des cafés de qualité supérieure et fera prévaloir son opinion pour que se développe la culture cafetière. »
Après la pause café nous allons déjeuner puis visiter le jardin botanique et un « mariposario » (espèce de zoo de papillons) situés non loin d’Arménia. La visite dure longtemps, trop à mon goût, et je ne vais pas m’attarder dessus ici si ce n’est insérer quelques photos que j’aime bien.
Après être rentrés à la finca, y avoir diné, avoir discuté tard avec David, avoir dormi puis petit-déjeuné, avoir rediscuté avec David, nous reprenons notre route pour Salento, petite ville très migonne où nous allons passer deux nuits.
Salento est située à 3/4 H d’Arménia et à 2100m d’altitude soit sensiblement plus haut que la finca. Il y fait donc plus frais que dans la vallée et les nuages qui descendent de la cordillière centrale nous gratifieront deux jours de suite, à 15H précise, de violents orages.
Cette petite ville est très touristique et ce pour deux raisons très simples : tout d’abord elle est très, mais vraiment très mignonne et pleine de charme, et ensuite parce que c’est le point de départ pour des excursions dans la vallée de Cocora, dont vous n’avez bien sûr jamais entendu parler, mais sur laquelle je vais revenir.
La ville est mignonne car très bien entretenue, toutes les maisons étant régulièrement repeintes dans des couleurs soit vives soit pastel. Sans rentrer dans le détail voici quelques photos pour vous donner une idée.
On dirait un village de carte postale. En parlant de cartes postales, Gaby a l’habitude, lorsque nous voyageons, d’adresser des cartes postales des différents pays visités à ses parents, son frère et notre fille. Mais en Colombie il y a problème car la carte postale est rare, très rare même … et particulièrement moche.
En plus il ne semble pas y avoir de poste. C’est du moins ce que nous a affirmé notre guide en nous précisant que quand on voulait envoyer quelque chose à quelqu’un on passait par des sociétés privées genre UPS.
C’est tellement bizarre comme situation que j’ai fait une recherche sur internet et cela a confirmé ce qu’on m’avait dit : il n’y a quasiment plus de service postal en Colombie. Après les timbres à $4 par carte postale en Equateur, c’est le plus de timbre du tout ici. On y viendra peut-être un jour chez nous : depuis que je me suis inscrit à la liste Robinson pour ne plus recevoir de pub et que toutes mes factures font l’objet d’un prélèvement automatique, mon facteur ne m’apporte plus guère que les revues auxquelles je suis abonné et les paquets que j’ai commandés en ligne.
Tiens, voici la banque :
et la superette/hotel :
Lui n’est pas repeint mais je le trouve mignon :
Mais venons en à la vallée de Cocora. Cette vallée située à une dizaine de kilomètres de Salento fait partie du Parque Nacional de los Nevados ce qui nous donnera l’occasion de payer un droit d’entrée de COP 3000 (soit €1,20) par personne.
On y accède de Salento le plus généralement en Jeep Willis. Les colombiens semblent avoir mis la main sur tous les stocks de ces jeeps, les avoir repeintes de couleurs vives pour pouvoir y transporter des touristes apparemment ravis de se cogner la tête et de se bouziller les lombaires.
La vallée disais-je est située entre 2400 et 3000m d’altitude, comprend d’innombrables sentiers de randonnée et de trek et se trouve être quasiment le seul endroit où pousse l’arbre national de la Colombie, j’ai nommé le palmier à cire.
Il faut reconnaître que le bougre a de la gueule : environ 50m de haut parfois plus, tronc généralement vertical et nu portant au sommet une touffe de feuilles. C’est le seul palmier qui pousse à une si haute altitude et il s’accomode bien d’une pluviométrie plus qu’abondante (nous en ferons l’expérience).
En plus l’arbre est particulièrement photogénique, ce qui me plait bien, même s’il faut se livrer à quelques contorsions si on veut l’appréhender entièrement (amis photographes je vous recommande le Nikon D5300 qui, par la vertu de son écran orientable, permet de photographier le palmier à cire en entier sans se salir le dos)
Photogénique même si la lumière est dég… et qu’on est dans le brouillard.
Mais on n’est pas venu pour admirer les arbres, on est venu grimper. Et nous voilà imper enroulé autour de la ceinture, bouteille d’eau dans le sac ou la poche, épaisse couche de crème solaire parfaitement inutile sur le visage et les bras, à grimper, grimper.
L’oxygène se fait rare et par voie de conséquence, le souffle se fait court. Je souffre ! Mais voilà mes sauveurs : de vilains nuages commencent à fondre sur nous me fournissant un excellent prétexte pour rebrousser chemin fissa. En fait, à peine assis dans la jeep, le déluge s’abattra sur nous.
Cette grimpette, une fois ma douche prise et une pizza avalée (soit dit en passant elles sont excellentes ici, pas du tout à l’américaine comme je le craignais, et à 4€ sont une affaire), cette grimpette donc m’aura laissé le souvenir cuisant de vilaines crampes qui m’envahissent au moment où j’écris ces lignes.
Sur ce je m’arrête donc pour quelques jours, nos prochaines haltes (désert de Tatacoa, site archéologique de San Agustin) étant annoncées comme étant sans wifi. A bientôt donc.
PS : Pour mes amis ornithologues, en herbe ou confirmés, voici une cliché unique à télécharger sans modération : un pic-pare brise surpris en pleine action 🙂
palmier à cire et pique parbrise… ce pays est diablement tentant!